Hood 38
Hood 38

Expériences particulières

Vécus mémorables

TransLém - Bise force 8

Régate en solitaire  à force 8 sur un Aphrodite 101 en 1979. Un tout grand merci aux propriétaires pour le prêt de ce magnifique voilier fait pour le solitaire.

Remontée du Léman depuis Genève par bise (vent du NE) de force 2-3 puis 4. Il fait beau, les solitaires tirent des bords au près. Nous avons une bouée à Yvoire (je crois me souvenir), devant moi, un Surprise gite fort, pourquoi ne réduit-il pas la voilure ? J'essaie un ris, mais ce n'est pas une bonne idée, je suis sous-toilé. Je le largue et navigue avec le foc auto-vireur. Facile.

Après la bouée de Vevey, en direction de Lausanne, j'ai pu envoyer le spi 7/8. La bise a forci ensuite. J'ai gardé le spi le plus longtemps possible, puis j'ai du lutter avec toute mon énergie (3 départ au lof dès que je lâchais la barre - pilote auto interdit, j'ai bien cru ne pas y arriver) pour l'affaler en début de nuit, par force 5-6. Puis la nuit est tombée, une  nuit bien noire, la bise s'est encore renforcée, c'était fort (mais j'avais pas d’anémomètre pour mesurer la force du vent), j'ai pas souvenir d'avoir pris un ris.
J'ai navigué longtemps avec le tangon affalé sur le foc sur le pont. Je n'osais pas lacher la barre. Finalement, j'ai pu aller sur le pont avant et renvoyer le foc. Les propriétaires m'ont dit que j'étais un des seuls à avoir passé la ligne avec 2 voiles.

J'ai fini 3ème au temps compensé.

HOOD 38 - 47 noeuds de vent

Nous sommes parti de St-Florent (Corse) au début octobre 1979, dans l'après-midi, pour rejoindre le continent. La météo n'annonçait rien de particulier. Sous un ciel gris, nous avons envoyé le grand spi (tribord amure). Le vent forcit ensuite légèrement en refusant. Nous affalons le spi et envoyons le génois (pas d'enrouleur, 1979 !). Le vent continue à forcir, régulièrement. Nous envoyons l'inter, puis hissons le solent, prenons ensuite un ris dans celui-ci et plus plus tard le 2ème ris dans la GV, tout cela  étalé dans le temps.

Nous nous retrouvons la nuit tombée avec 3 ris et sous tourmentin. Nous naviguons grand largue, les vagues se creusent, mais restent encore raisonnables. Le vent continue de monter. Que faire ? Angoisse du vent qui monte, qui monte. Je descends à la table à carte et je regarde nos options. Le vent est d'Est, mais nous n'avions pas encore classé cet épisode météo dans la catégorie "Coup de vent d'Est". Si le vent monte trop, on pourra prendre la fuite, la mer est libre jusqu'à Gibraltar ;-).

Le barreur ayant de la peine à barrer dans les vagues devenues plus importantes, je remonte dans le cockpit, m'assure et reprend la barre (à roue). Il doit être 23h00. L'anémomètre (mesure effective, pas de compensation par rapport à la vitesse du bateau) est dans les 30 nds. Nous continuons grand-largue, cap sur Saint-Tropez. Nous marchons à au moins 10 noeuds, au maximum de la vitesse de ce 38 pieds massif.

Les vagues commencent à taper violemment le cul tribord arrière et finissent pas déferler sur le pont et dans le cockpit. Maintenant, de temps en temps, le cockpit se remplit même complètement. Je dois barrer debout sur les banquettes.

Nous lisons la force du vent sur l'anémomètre non compensé : la pointe la plus forte est de 37 nds (ajoutez les 10 nds de vitesse relative et on arrive à une pointe de 47 nds de vent réel). Le vent se stabilise à cette force (40-45 nds, 30-35 nds à l'anémomètre).

La nuit est noire, le bateau se comporte très bien, nous avons la bonne toile. Mon angoisse se dissipe lentement, avec la stabilisation de la force du vent et des éléments, le vent diminue par la suite (30 nds).

Je suis le dernier vaillant. L'intérieur de bateau semble être assez terrible. Plusieurs équipiers n'ont pas réussi à garder le contenu de leur estomac ...

J'ai passé de longues heures à la barre, debout sur les banquettes du cockpit.

Vers 3h du matin, je suis relevé par mon second et je vais me coucher à l'avant. Je m'endors de suite et je ne souffre pas du mal de mer. Peut-être que les vagues se sont calmées un peu.  Vers 5h, un équipier tout excité vient me réveiller : un phare, un phare ... Je me lève tel un zombie et enfile mes cirés : grave erreur, nous sommes encore à bien 20 M de la côte.

Nous atterrons bien et sans problème dans le Golfe de St-Tropez. Je suis grogui d'avoir si peu dormi.

Amarrage sans histoire à St-Trop dans la matinée.

 

Le lendemain matin, nous navigons de St-Tropez au Lavadou. La météo nous (et à d'autres) ayant annoncé une renverse en Mistral pour le lendemain. Et il nous reste encore 2 jours de location, donc cap à l'W.

Le vent est d'Est, fort lors de la sortie du Golfe de Saint-Tropez (6 bf), puis sans souci (4-5 bf), par vagues fortes, en longeant la côte. Nous croisons un petit voilier habitable (dans les 9 mètres) avec 4 personnes à bord. Je me rappelle que nous avons croisé un gros gros bateau passager (hôpital ?, à l'allure militaire) à l'ouest du Golf.

Nous sommes arrivés sans encombre dans le port du Lavandou et nous nous sommes amarrés comme des grands: cul au ponton. Au milieu de la nuit, mon second me réveille pour dire qu'ils ne peuvent pas dormir : le vent d'Est a forci à nouveau et les vagues passent par-dessus la grande digue du môle sud, traversent la route d'accès (où 2 voitures peuvent croiser sans souci - pour donner une idée de la largeur) et remplissent le cockpit avec un immense fracas.

Nous tournons le bateau (sans trop de difficulté, mais avec plusieurs longs bouts pour nous maintenir) et pendant ce temps, une vague plus forte que les autres arrache un ilot en maçonnerie (une borne avec eau et 220V), jaillissement d'étincelles et d'un gros éclair puis nuit noire : toutes les lumières du port s'éteignent et à la place de l'ilot, un magnifique jet d'eau. Du jamais vu de toute ma vie de marin (1975 à aujourd'hui - 2023).

Le lendemain, force 9 d'Est sur la baie du Lavandou : le loueur insiste pour ramener lui-même le bateau un autre jour (aussi une première dans ma vie de locataire).

 

Deux morts

En lisant le journal ce matin là, nous apprenons le décès de 2 personnes. De toute évidence, 2 personnes du voilier que nous avions croisé la veille. Le journal explique qu'une grosse vague a fait brusquement gîter le bateau, qu'une des personnes a basculé par-dessus bord et que le chef de bord, seul marin vraiment compétent, a sauté à sa suite (ils venaient de se marier).

Il semble qu'une des personnes avait un gilet, mais je ne suis plus sûr de cette information. Les 2 équipiers restants, débutants, ont, après de longs efforts, réussi à affaler les voiles et à démarrer le moteur. Ils se sont dirigés vers les 2 personnes tombées à la mer, mais n'ont pas pu ou osé s'approcher plus près, à cause des brisants impressionnants. Le vent et les vagues poussaient à la côte.

Puis, impuissants, ils sont partis donner l'alerte. Nous n'avons pas vu de fusées.

Un corps a été retrouvé flottant près de la côte et l'autre échoué sur la plage.

Moralité : toujours porter un gilet de sauvetage, s'attacher au bateau et y rester tant qu'il flotte. Instruire les équipiers avant le départ sur le maniement du bateau et des moyens de secours (fusées,  Sling Line (à installer dans le balcon arrière), VHF, tél. portable, ...).

 

First Class 8 - Force 10 - Solo. 1989?

Convoyage de mon First Class 8. Coup de Joran mémorable.

Surpris, sur le loc de Neuchâtel, par un coup de Joran (vent thermique assez fort (typiquement 4bf à cette époque. Aujourd'hui plus fort (2023) du NW combiné avec un orage d'été. Les feux d'alarme ont tourné seulement à 40. Lorsque j'ai vu le vent arriver, au large de Neuchâtel, j'ai essayé de rejoindre la rive, mais même avec le moteur de 8cv à fond (les voiles affalées et rangées), le Class 8 n'arrivait pas à progresser et repartait en marche arrière repoussé par les vagues devenues fortes (par rapport au Class 8).  J'ai alors abattu et navigué environ 3h, à sec de toile, au moteur à mi-régime, vent de travers, le liston et les pieds des chandeliers sous l'eau (je devait convoyer le bateau à Bevaix). J'ai navigué parallèlement à la côte N du lac.

La police du lac a mentionné un force 12. Les vagues n'étaient pas trop grosses (fetch de 1 km). Aller s'ancrer au vent de la côte sud me paraissait trop dangereux (mauvaise tenue, vagues fortes). Le seul risque sérieux était un bris du safran, voir une panne d'essence. Lorsque le vent a baissé, dans la nuit,  j'ai hissé le tourmentin (la moitié de la surface du foc de route). Le bateau s'est complètement couché deux fois, barres de flèches touchant presque l'eau.

Il devait donc bien rester un force 8. Et la force pendant le coup de vent était bien supérieure. Il faisait nuit, pas d'anénomètre, impossible de préciser.

L'orage s'étant éloigné et le vent calmé, j'ai pu m'amarrer facilement dans une place à Bevaix. Des personnes sont venues sur le ponton vérifier leur bateau et elles parlaient d'un coup de vent mémorable

Conclusion : une très, très grosse frayeur en voyant le vent arriver devant Neuchâtel (les lumières de la côtes étaient comme derrière un verre dépoli) : je me suis cramponné au winch, mais le vent n'était pas assez fort pour gêner mes déplacements dans le cockpit.

Ensuite, aucun souci, à part le niveau de l'essence qui baissait et de ne pas pouvoir avaler mon pique-nique, même à l'abri dans la cabine. Se faire coucher sous tourmentin seul n'est pas un souci, juste surprenant (ayant sous-estimé la force du vent restant).

Leçon: ne pas sortir du port par condition fortement orageuse, sans pouvoir voir la forme et l'évolution des cumulus - en particulier leurs sommets (une couche nuageuse basse mais gris clair (le pied du cumulus ?) s'est étendue largement au moment de quitter le port, et je ne pouvais pas voir ce qu'il y avait au-dessus).
Les prévisions météo même aujourd'hui ne sont pas parfaites, et des événements soudains (force et et heure) seront toujours plus probables.